J’ai commencé à étudier le japonais en décembre 2020, ce qui fait donc maintenant 4 ans que j’étudie (quasiment) tous les jours la langue et je voulais réfléchir dans ce post aux erreurs qui font que j’ai à peine un niveau N4.

Après avoir appris les hiraganas de mon côté. J’ai appris l’anglais de manière assez naturelle, avec quelques cours à l’école mais aussi et surtout en regardant des vidéos YouTube et des séries. Par contre, pour le japonais, je n’avais pas l’impression que c’était possible d’utiliser cette méthode, donc j’ai décidé de prendre des cours privés sur Skype.

Pour ces cours, nous avons utilisé Genki 1 et 2, qui sont des manuels en anglais (en fait, je découvre en écrivant ce post qu’ils sont maintenant traduits en français !). Mais je pense que l’outil principal que j’ai découvert à l’époque, et que j’utilise toujours, est Anki, un système de répétition espacée qui est très utile pour apprendre le vocabulaire notamment. Nous avons terminé Genki en, il me semble, deux ans, et la suite s’est faite avec Quartet, des mêmes éditeurs, donc aussi en anglais. C’est là que se pose la première grosse erreur :

Ne pas apprendre les kanjis (genre du tout)

Dans Genki, il y a toujours des furigana et le vocabulaire est toujours présenté avec le mot en hiragana à gauche, en kanji au centre, et la traduction à droite.

Extrait d’un texte de Genki où l’on peut voir les furigana sous les kanjis

Extrait d’une liste de vocabulaire de Genki

Ce qui fait que pendant ces deux ans, j’ai toujours appris mon vocabulaire en hiragana, sans même faire l’effort d’essayer de lire le vocabulaire en kanji. Sur mes cartes Anki, tout était également en hiragana. Et ça, ça complique vraiment l’apprentissage, parce qu’il y a énormément d’homophones en japonais. C’est hyper important d’apprendre les kanjis pour pouvoir différencier des mots comme baguettes (はし) et pont (はし), par exemple.

Ne pas être assez régulier sur Anki

Comme dit avant, Anki est un système de flash card avec de la répétition espacée, ce qui permet de bien retenir le vocabulaire. Par contre ça implique que Anki doit être utilisé tous les jours pour ne pas oublier les mots. Mais réussir a être aussi consistent, c’est vraiment pas facile, surtout quand on dose mal la quantité de nouvelles cartes ce qui mène a devoir réviser des centaines de cartes. Ça pousse donc a sauter des jours, sauf que les cartes qu’on devait réviser sont poussé au jour suivant en plus des cartes de ce jour là.

Heatmap de mes révisions Anki lors de ma première année, grace à l’addon “Review Heatmap”

La première année, ça m’arrivait de sauter jusqu’à une semaine et les points sombre sont des jours ou j’ai du réviser ~600 cartes.

Heatmap de mes révisions Anki lors de ma deuxième année

La deuxième année a été pire, avec certains jours qui montaient à ~900 révisions. J’en suis même venu a arrêter Anki pendant un long moment, par ce que je devait me concentrer sur mes études et je pouvais pas passer 4 heures par jour sur ça.

Heureusement, il y a une solution. Déjà, à l’époque j’avais ~20 nouvelles cartes par jour, ce qui est beaucoup trop et mène a avoir beaucoup de révision ce qui pousse a sauter certain jour. Ensuite, bah il faut juste pas sauter de jour, ce qui est plus simple avec moins de cartes.

De nos jours je me limite donc à 11 nouvelles cartes par jour, ce qui fait que j’ai en général autour de 100 cartes a réviser, ce qui est clairement tenable. J’en suis d’ailleurs à 103 jours de révisions d’affilé, que j’espère tenir !

Apprendre le vocabulaire hors contexte

Genki propose une liste de vocabulaire pour chaque leçon, mais la majorité des mots ne sont pas utilisés, à l’exception de ceux avec un astérisque à côté. Cela signifie que ces mots ne sont pas étudiés en contexte. Cela m’a poussé à créer des cartes Anki uniquement composées du mot et parfois d’un indice pour les homophones.

Tout cela rend la mémorisation beaucoup plus compliquée, et surtout la compréhension de la manière dont le mot est réellement utilisé en japonais. Parce que les mots n’ont pas toujours d’équivalent direct d’une langue à l’autre.

Pour pallier ce problème, en début d’année, j’ai commencé à étudier le deck Tango N5 (ici une version traduite en français), qui présente toujours les mots dans une phrase. De plus, les phrases suivent un schéma dit , c’est-à-dire qu’elles se basent toujours sur des éléments déjà appris en ajoutant un seul nouvel élément. À l’exception de la grammaire, qui elle peux être introduite en même temps qu’un nouveau mot. Mais c’est généralement mieux de d’abord l’étudier séparément. Par contre, le fait d’avoir un deck sous cette forme aide, car ça permet de réviser la grammaire en utilisant Anki.

En utilisant un deck de ce genre, on pourrait se dire qu’on comprend parfois des mots principalement parce qu’on reconnaît la phrase. Bien que ce soit effectivement le cas, je pense que ce n’est pas un problème. C’est aussi quelque chose qu’on fait en français ! Quand on écoute quelqu’un, le cerveau ne comprend pas chaque mot un par un, mais utilise plein d’autres indices : l’expression de la personne, son ton, et les mots dits précédemment, par exemple. Donc peut-être que le mot n’est pas parfaitement maîtrisé grâce au deck, mais ce n’est pas un souci, car cela peut être compensé par l’immersion.

Utiliser Anki en français → japonais

Tango N5 fait une autre chose bien : il présente des phrases en japonais et teste uniquement si l’on est capable de comprendre leur sens. Quand j’ai commencé à utiliser Anki, mes cartes étaient composées de deux versions : une avec le japonais au recto et le français au verso, et une autre avec l’inverse. Le problème est que, au début, cela n’est pas toujours productif. Premièrement, il vaut généralement mieux concentrer ses efforts sur la compréhension plutôt que sur la production (https://www.youtube.com/watch?v=J0o3Xbom0p0). Et deuxièmement, cela double le travail sur Anki pour un seul mot.

Ne pas abandonner les leechs

Lors des révisions de mots considérés comme “connus”, l’algorithme d’Anki compte le nombre de fois que vous oubliez un mot. Au bout de 8 oublis (le nombre peut être modifié), la carte est marquée comme “leech” et suspendue, ce qui signifie qu’elle n’apparaîtra plus lors des révisions.

Le but de ce système est d’éviter de passer trop de temps sur quelques cartes qui demandent beaucoup plus d’efforts que les autres. Au début, je pensais que je devais à tout prix apprendre ces mots, mais si elles sont marquées comme leech, c’est que l’effort nécessaire pour les apprendre est trop grand, et qu’il vaut mieux concentrer son énergie sur les autres cartes. Parfois, il peut être intéressant de modifier la carte pour voir si elle n’est pas assez claire ou si elle a besoin d’une astuce mnémotechnique, mais si vous utilisez un deck pré-fait, il est très important de laisser les leechs en suspension. Cela signifie qu’il est trop tôt pour apprendre ce mot, et qu’il sera toujours possible de l’apprendre plus tard grâce à l’immersion.

Ne pas faire d’immersion

Voilà ma pire erreur, si fondamentale que j’aurais très bien pu commencer à étudier le japonais cette année et avoir le même niveau qu’aujourd’hui.

Dans une présentation faite dans les années 80, Stephen Krashen a parlé de la manière dont l’Homme apprend une langue (https://www.youtube.com/watch?v=NiTsduRreug). Il présente la notion d’input compréhensible et explique que tout le monde apprend une langue de la même manière. Cela peut sembler étrange, car ce n’est pas du tout comme cela qu’on enseigne les langues à l’école, mais si vous parlez anglais ou si vous demandez à des personnes parlant anglais, elles vous diront qu’elles ont toutes appris en consommant du contenu en anglais (c’est mon cas, grâce à YouTube et aux séries).

Là où le japonais est un peu piégeux, c’est qu’il n’a pas le même système d’écriture, ce qui rend le début de l’immersion beaucoup plus difficile. Cependant, en appliquant ce que j’ai dit plus haut, par exemple en utilisant le deck Tango N5, je pense qu’il est possible de se préparer à l’immersion et de commencer à regarder du contenu créé par des natifs pour des natifs, au moins avec des sous-titres et un outil comme Yomitan.

Si vous devez retenir une seule chose de ce post, faites de l’immersion !

Ressources pour aller plus loin

Si ce que j’ai dit vous semble pertinent, je vous recommande vivement de consulter ce site qui explique comment apprendre le japonais par immersion : https://donkuri.github.io/learn-japanese/fr/.

Le bootcamp de Obi Senpai est également une excellente ressource, notamment grâce à la traduction en français des decks Tango N5-N4 et ses vidéos sur la grammaire : https://obisenpai.notion.site/JLPT-N5-BOOTCAMP-PUBLIC-f9dafeece95f438c870ee5ffda4bdc32.